
Des enfants en poussette sur la « pit lane » deux heures avant le départ d’une course ou des centaines de familles en balade le long d’un circuit: c’est ce qu’on pouvait voir samedi dernier à Francorchamps. Les « 6 Heures de Spa » rêvent de renouer avec le succès des « 1.000 Km de Spa » qui, dans les années 60 et 70, faisaient concurrence au Grand Prix de Belgique de Formule 1.
Francorchamps accueillait ces derniers jours la deuxième manche d’un championnat du monde d’endurance qui n’existerait pas sans sa course vedette, les « 24 Heures du Mans » (14 et 15 juin), portée par tout le pays de la Sarthe. Un peu comme la Région Wallonne soutient contre vents et marées « son » Grand Prix avec la bénédiction de Bernie Ecclestone (83 ans), ce dernier fusse-t-il aujourd’hui empêtré dans des affaires dont il pourrait encore émerger, avancent quelques initiés.
Comme beaucoup d’autres disciplines, l’endurance a été tuée par le succès de la Formule 1 qui a progressivement tout monopolisé à partir des années 80: les grands constructeurs, les pilotes, les sponsors, le public, les circuits et les médias dont essentiellement la télévision. Sans le prestige de la discipline au sommet, l’herbe aurait déjà envahi le bitume dans les paddocks de Francorchamps.
Audi, Toyota et Porsche. Avant d’autres?
Aujourd’hui, alors que les promoteurs des Grands Prix à la recherche de dollars frais ont partiellement délaissé l’Europe, d’autres compétitions mondiales en circuit (tourisme, endurance, GT) tentent un retour pas évident dans la conjoncture économique. Deuxième manche du « WEC » (World Endurance Championship) après Silverstone, les « 6 Heures de Spa » ont rassemblé une petite trentaine de prototypes et de GT dont, à côté d’Audi et de Toyota qui rêve d’un premier succès au Mans, Porsche de retour dans cette discipline. Avec de belles voitures, des technologies innovantes (essence hybride ou diesel hybride pour Audi), de bons pilotes parfois issus de la Formule 1 et des performances d’un niveau élevé (une dizaine de secondes en plus que les F.1 sur un tour), ce championnat est sur une bonne voie. A quand de nouveaux constructeurs?
Venu de Hollande, d’Allemagne, de France et… de Belgique, le public où se mêlaient passionnés, supporters des pilotes connus (Mark Webber, Kristensen, Nakajima…) et familles a apprécié. En plus du spectacle de qualité et d’une information soignée à travers des écrans géants, les organisateurs avaient eu la bonne idée de prévoir un billet unique (28 € en prévente) permettant de voir les voitures et les pilotes de près (avec séances d’autographes) et de se balader dans les allées des paddocks bordées par des « hospitality units » de prestige. En plus de balades tout au long de l’après-midi sur les chemins surplombant la piste .
La course en elle-même fut plutôt limpide avec de nouvelles Porsche très rapides mais encore en phase de fiabilisation, des Audi un peu en retrait en raison des réglages aérodynamiques défavorables à la vitesse de pointe (- 25 km/h par rapport à leurs rivales en haut de la ligne droite des Combes) et des Toyota très fiables, avec à la clé une deuxième victoire japonaise en deux courses. La grande inconnue reste bien sûr le comportement des mêmes voitures et des mêmes équipes lors du double d’horloge au Mans. Le rythme y sera-t-il le même? Quid des bordures allègrement franchies ce week-end et surtout de la gestion des arrêts au stand? En termes de stratégie, il est difficile de ne pas accorder la préférence à l’équipe expérimentée Audi, malgré la relative déconvenue spadoise où la R8 e-tron quattro a pris la deuxième place à 1min13s de la Toyota S040 hybride du trio Davidson-Lapierre-Buemi.
Une seule certitude: la différence de vitesse, très visible à Spa où les leaders étaient souvent bloqués par des voitures plus lentes (14 secondes d’écart sur 7 km entre le premier et le dixième), sera une source d’incidents au Mans. Le phénomène n’est pas neuf: dans l’ancienne ligne droite des Hunaudières, Jacky Ickx disait rouler la nuit « comme un chauffeur de taxi » afin de ne pas le laisser surprendre par les manoeuvres de voitures moins rapides.
Des « 1.000 km » d’anthologie
Reste à voir comment évolueront ces 6 Heures de Spa. On ne refera l’histoire du grand Francorchamps. Toujours bon pied bon oeil à 87 ans, l’ancien pilote Freddy Rousselle nous rappelait samedi avoir bouclé son meilleur tour dans les années 50 sur Jaguar à 192 km/h de moyenne, ce qui supposait d’emprunter la descente de Masta à 280 km/h. « Ce n’était pas dangereux, il fallait juste garder la bonne trajectoire!; au bas du circuit, le point de repère à Stavelot était le petit muret à gauche où on accélérait à fond jusqu’au 2e poteau après le virage, car on savait que toute la remontée était conditionnée par la vitesse de passage à cet endroit. » En 1973, Jacky Ickx (Ferrari 312 PB) a bouclé son meilleur tour à 262, 461 km/h de moyenne et, en course, Henri Pescarolo (Matra MS 670B) a fait presque aussi bien pour établir le record définitif de l’ancien circuit. Les « 1.000 Km de Spa », c’est aussi l’avance de 38 secondes prises sur un tour par Jacky Ickx sous la pluie (en 1968 sur Ford GT 40) ou les deux Porsche 917 de Jo Siffert et Pedro Rodriguez abordant flanc contre flanc le raidillon au départ des 1.000 km 1970. Jugé trop dangereux après l’édition 1975, Francorchamps perdit ses 1.000 km revenues sous différentes formes à partir de 1982 avec plus ou moins de succès.
Sur le circuit de Francorchamps raccourci, une course de longue haleine pour de spectaculaires prototypes garde tout son sens. Cette relance du championnat du monde d’endurance depuis 3 ans sera-t-elle la bonne? Au-delà d’une organisation de qualité et des efforts promotionnels, la réponse ne se situe pas selon nous à Spa mais d’abord au Mans dont l’image reste porteuse dans le monde entier. Ainsi, une des idées serait d’entamer la saison en automne pour la terminer en apothéose à la mi-juin aux 24 Heures du Mans.



Je reconnais la performance sportive et la prouesse énergétique;mais qu’est ce qu’elles sont laides!!!Cependant,j’ai 67 ans et pour moi,dans mon coeur,les plus belles étaient les Jaguar type C et D ainsi que la Ferrari 250 TR de Gendebien et Frère.Nostalgie quand tu nous tiens!!!N’est-il pas,cher Yves.Merci et bravo pour tes articles précis et remarquablement documentés;amitiés,Paul.
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Nostalgie effectivement; on ne refera pas la 250 TR, mais le spectacle ne manquait pas d’allure avec quelques très bons pilotes, notamment dans la descente du circuit et le double gauche. Et puis,une balade d’1h30 le long de la piste et sous le soleil pour voir différents passages, cela reste peu banal. Amitiés.
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