Hommage à Paul Frère, acteur et témoin d’un siècle d’automobile


Paul Frère, une vie nourrie par la passion de l'automobile.
Paul Frère, une vie nourrie par la passion de l’automobile.

Six ans après le décès de Paul Frère en 2008, un premier livre  est enfin consacré à ce pilote et journaliste automobile mondialement reconnu. Un hommage teinté d’émotion et cernant la personnalité d’un  homme  à la passion sans limite mais d’une très grande discrétion.


Dans un monde où la notoriété se construit aujourd’hui à coups de buzz sur les réseaux sociaux, il est peu probable que Paul Frère aurait généré des centaines de milliers de clics, pas plus que son nom ne devrait émerger d’un sondage de popularité dans le grand public, en Belgique du moins. Même ses enfants – il a eu trois filles- reconnaissent n’avoir pris connaissance qu’au fil des années de la notoriété de leur père pour qui l’automobile passait avant toute autre considération, même parfois familiale, et  qui réunissait des talents rarement associés à un tel niveau: pilote automobile de renom et journaliste automobile maîtrisant les subtilités de la mécanique. En plus d’une grande connaissance des règlements du sport automobile qui lui valut de jouer un rôle dans l’ évolution technique des 24 Heures du Mans et de Francorchamps.

Comme le rappelle Pierre Dieudonné, lui aussi journaliste et ancien pilote, dans la préface du livre qu vient de sortir  (1), « Paul Frère est né (ndrl en 1917) à l’époque où la voiture à moteur thermique commençait à passer de l’artisanat à la production industrielle et il en a connu l’âge d’or jusqu’au avancées du début de ce 21e siècle ».

On ne peut pas résumer en quelques lignes la longue vie de cet ingénieur commercial diplômé de Solvay, grand amateur de sport (il fut à cinq reprises champion de Belgique universitaire d’aviron) et surtout de mécanique. Dans un milieu familial hermétique  à un sport jugé trop dangereux -ses parents n’assistèrent qu’à une seule de ses courses-, il fit ses premières armes au lendemain de la guerre,  en moto -notamment dans le Bois de la Cambre à Bruxelles-  et sous le pseudonyme de « Frépau ».

Vainqueur des 24 Heures du Mans 1960

Au fil des années, il construisit ensuite un palmarès qui le conduisit jusqu’au sommet du sport automobile face à des adversaires comme Fangio et Stirling Moss (4e du GP de Belgique 1955, 2e du GP 1956, toujours sur Ferrari), jusqu’à une prestigieuse victoire aux 24 Heures du Mans 1960 sur une Ferrari 250 TR qu’il partageait avec un autre pilote belge, Olivier Gendebien. « Paul avait une incroyable sensibilité automobile, raconte Freddy Rousselle, un de ses coéquipiers, notamment au Mans en 1957. Il sentait immédiatement un problème. Cette connaissance de la mécanique explique aussi que nous ayons été épargnés par les accidents, car on savait avec quoi on roulait ».

Parallèlement à la carrière sportive d’un « gentleman driver » toujours présent dans nos coeurs,  comme le souligne un des proches dont il influença la carrière (le journaliste et ancien pilote Philippe de Barsy) , Paul Frère écrivit une vingtaine de livres autour de l’automobile. Aidé par sa maîtrise des langues étrangères (anglais, allemand, italien), il fut présentateur d’un magazine automobile à la ZDF et collaborateur à la revue américaine Road & Track et aux magazines coréen et japonais  Car Vision et Car Graphic. En 2009, un an après sa mort, ce dernier consacra un numéro spécial de 150 pages  (!) à un homme qui avait aussi l’oreille des grands constructeurs automobiles, y compris au Japon et aux Etats-Unis . « C’est en partie grâce à lui, estime Claude Dubois, ancien pilote et membre de l’Ecurie Nationale Belge,  que les voitures américaines actuelles n’ont aucun complexe par rapport aux européennes au niveau du comportement routier. »

Franc, pur mais trop gentil

Au-delà de cette biographie hors du commun, il y avait l’homme, discret, voire « franc, pur mais trop gentil et qui s’est dès lors fait avoir trop souvent », ajoute Freddy Rousselle.  Livre d’hommage réalisé par Serge Dubois qui a travaillé un an sur ce projet, « Paul Frère » fourmille de témoignages souvent émus et d’anecdotes. Nous y ajouterons la nôtre: associés aux « 24 Heures de Francorchamps » qu’il avait relancées en 1964 avec Hubert de Harlez, directeur au R.A.C.B., Paul Frère suivait chaque édition presque de bout en bout, ne s’accordant qu’un bref repos dans sa voiture, en général une Porsche qui était sa voiture fétiche. Peu après l’arrivée, il nous rejoignait  dans les bureaux du « Journal des 24 Heures », partageant la « coupe » de fin de course pendant que chauffait la colle destinée à rassembler dans un livre les infos accumulées pendant 4 jours.  Puis, son « Journal des 24  Heures » sous le bras, il remerciait l’équipe avec sa simplicité habituelle et  quittait le circuit, muni d’ un peu de lecture supplémentaire pour les soirées d’hiver.

Seule  la passion … et la natation quotidienne, nous disait-il, lui ont valu de garder un esprit vif jusqu’à sa mort à l’âge de 91 ans, malgré un corps usé par une aventure vécue à 200 km/h. Ses cendres, ses proches les ont répandues dans le raidillon  de Francorchamps où un virage porte son nom  au raccordement entre le circuit de 14 km et l’actuel et avant la remontée vers Blanchimont.

(1) Paul Frère, par Serge Dubois, 260 pages, 500 photos, préface de Pierre Dieudonné,édition FSA, 49  euros.

 

Toujours passionné malgré son âge, Paul Frère longe le circuit de Francorchamps (ph. fan de Spa-Francorchamps).
Toujours passionné malgré son âge, Paul Frère longe le circuit de Francorchamps pendant les 24 Heures (ph. Lorquet.be).

 

Paul Frère « made in Japan »

 

Hommage à Paul Frère par la RTBF en 2008

 

 

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